Gare grise, mais de toute la gamme chromatique des gris. Unis le plus souvent, plus ou moins dégradés par l’usure générale, mais aussi granités des bordures de quais ou des marches des grands escaliers à l’ancienne du hall Maine – qui tremblent sous nos jambes par moment sans qu’on comprenne pourquoi, par quelle loi mécanique de déformation nécessaire à cette imbrication complexe d’escaliers et d’escalators suspendus dans un grand vide. Ailleurs, gris mats ciment, luisants béton, brillants métal ; sans oublier l’anthracite crasse toujours prête à rajouter sa couche ni le gris souris des souris qui traversent les traverses. Montparnasse monde gris répétitif (comme certaines musiques que je goûte assez). Nuancier de la gare dicté sans nuance par celui des matériaux qu’on ne s’est pas amusé à peindre – une surface pareille et puis, des goûts et des couleurs, allez mettre tout le monde d’accord ! Il y a juste ces deux murs en vis à vis, aux deux extrêmités, du hall Maine confiés, a fresca, à un artiste cinétique bien dans le goût assez pompidolien de l’époque à laquelle on avait reconstruit la gare en lui faisant prendre un certain recul.

Exercices de gare. Parmi les plus difficiles que je connaisse : calculer le poids moyen d’un bagage de voyageur, à l’arrivée, au départ (voies 10 à 17 exclues, mais 25 à 28 comprises) ; pour les voies 10 à 17 uniquement, le poids moyen d’un sac à commissions (le soir), d’un cartable et d’un petit sac à dos journalier (la mode des attachés-cases a passé) ; la somme du nombre de pas dépensés dans la gare, un jour ouvré, un jour ouvrable, un dimanche et fête, par les voyageurs, par le personnel de la gare, par celui des trains et par les agents des sociétés sous-traitantes ; le nombre moyen quotidien de chiens, de chats et de furets passant et repassant par la gare ; celui des cafés qu’on y ingurgite ; évaluer l’énergie produite par la mise en marche simultanée, sous le panneau d’affichage des voies, de la totalité des passagers d’un TGV double affiché tardivement, et ce qu’on pourrait faire avec. Il va de soi que tous les calculs afférant aux personnes et aux animaux doivent les distinguer selon leur sexe, sans quoi ces exercices et leurs résultats ne serviraient de rien à l’avancement des travaux en sciences humaines relatifs au genre que je mène par ailleurs.






