L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Samedi après-midi à Coney Island

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Transposons : on prendrait le métro à Paris, Porte de Clignancourt, donc la ligne 4, et sortant au terminus Porte d’Orléans, il y aurait

entre la station et la plage une foire, à laquelle les mouettes tourneraient résolument le dos

et un concours idiot (chez nous on compterait les andouillettes) avec son male record et son female record, naturellement beaucoup moins spectaculaire, mais pour une fois cela nous serait bien égal,

de toutes façons, sur la plage, on les oublie vite Sonya Thomas et Joey Chestnut encore champions pour 256 jours 22 heures 47 minutes 52 secondes 7 dixièmes.

Juste qu’on leur envie Coney Island

et les étés indiens.

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Le retour de la couturière

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Pour “Les Passagers de la nuit” de Thomas Baumgartner sur France Culture, à l’automne 2009 j’avais écrit une fiction brève (quatre fois cinq minutes à deux voix) Couture à domicile. C’était à quatre moments de leurs vies les confidences échangées par une couturière et sa cliente lors de quatre séances d’essayages, sur un quart de siècle (le troisième du vingtième pour être précise).

Depuis, j’ai rebrodé sur le thème, en modifiant les dates et en provoquant l’irruption, en cours de séances, de quelques autres personnages. Il existe ainsi deux autres versions du texte initial, avec plus ou moins de monde et des amplitudes chronologiques élargies ou resserrées.

Aujourd’hui, dans la collection “Ouvrez” des éditions publie.net, paraît en numérique l’une de ces versions sous le titre Couturière. Pour la découvrir et l’acheter – 1,99 euros seulement, avec forcément le format adapté à votre degré de modernité, vous pourrez la lire sur votre ordi relié à une imprimante, sur votre tablette  ou sur votre smartphone – c’est très simple. Et chez publie.net, les auteurs à découvrir ne manquent pas…

Vous ne risquez rien à essayer : j’ai enlevé toutes les épingles.

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Frantz Schubert à Carnegie Hall

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A Carnegie Hall dimanche, mais pas dans la grande salle, au Weill Recital Hall, petite salle située au 4e étage, vouée à la musique de chambre, et de fait il s’agissait des deux trios de Schubert interprétés par le Clavier Trio (Arkady Fomin, violon, Jesus Castro-Balbi, violoncelle et David Korevaar au piano). Dehors il pleuvait. Le concert était à 2 p.m. je n’avais pas réservé à l’avance et j’ai été très heureuse d’acheter ma place sans aucune difficulté à l’ouverture des guichets à midi. Entre temps je suis allée me restaurer au Deli Premier Café angle 7th avenue 55th st. Revenue pour l’ouverture de la salle – je voulais jouir du lieu – je suis allée de surprise en surprise. D’abord la salle d’une architecture un peu inattendue perchée à un quatrième étage.

Ensuite le public, composé à 80 % de vieilles dames russophones, qui étaient là comme chez elles, entre elles ou tout comme, accompagnées de 10 % de vieux messieurs russophones, un peu plus jeunes m’a-t-il semblé et, éparpillés parmi eux, de 9,50 % de germanophones des deux sexes et d’âges mêlés. Je m’arrondis au 0,5% restant : il y a 268 places dans la salle. Ma voisine de droite, vieille dame russe (qui me demande à l’entracte si j’enjoy, comme je lui réponds, m’arrête pour me demander si je parle anglais, ce que je croyais bien être en train de faire) m’expliquera que le public de ces concerts est toujours celui-là et que, d’ailleurs, elle devra se hâter à 4 p.m. d’en rejoindre un autre à Columbus Circle. Elle espére qu’à 4 p.m. le Clavier Trio en aura fini avec Schubert. Ce qui arrivera car, troisième surprise, les deux trios sont exécutés avec grand entrain. Un Schubert électrisé par le Nouveau Monde, qui a son charme et sa virtuosité, mais surprend un peu à première oreille.

Le deuxième trio de Schubert, je ne suis sans doute pas la seule à l’avoir découvert dans une salle de cinéma, grâce au Barry Lyndon de Kubrick, film qui m’avait légèrement ennuyé : je n’étais pas encore une dix-huitiémiste convaincue. Le premier trio c’est dans une magnifique émission – que j’aimerais bien réentendre – de la série “La musique et les hommes” consacrée à Roland Barthes que je l’ai entendu pour la première fois. Barthes y tenait des propos sur la musique romantique de même pertinence que ces écrits sur la photographie. J’ai malheureusement usé la cassette enclenchée en catastrophe, prise au dépourvu, enregistrement amputé des premières minutes. Je me souviens qu’il avait aussi parlé de ce qu’écoutaient sur leur transistor les peintres qui, dans ces jours-là, repeignaient son appartement.

C’est en sortant de Carnegie Hall que j’ai croisé  la Polish Parad ou Polish Pride. Aujourd’hui, sur la même 5e avenue est passée la Columbus Day Parad, mais j’étais à mon bureau d’ici, Washington Square.

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New York bleu samedi

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Ce samedi New York était franchement bleu. Le samedi matin les New-Yorkais promènent leurs chiens et leurs enfants, en laisse, sur leurs épaules, en charriots attelés à leurs vélos, en poussettes à rollers. Certains font d’une pierre deux coups et apprennent à leurs enfants à promener les chiens. En semaine les chiens sortent aussi mais leurs promeneurs sont mercenaires et les enfants traversent la ville dans des autobus jaunes. J’imagine que les New-Yorkais se procurent leurs enfants à peu près comme nous, mais leurs chiens, la variété des modèles induit la question de leur provenance. J’en ai croisé aujourd’hui des espèces tout à fait inconnues des trottoirs parisiens et dont les gabarits s’échelonnaient du guère plus gros qu’un écureuil au veau bien en chair. J’ai même croisé un excentrique tracté par ses deux veaux. Mais dans l’Hudson River Park, ce que je regardais, c’était la ville de l’autre côté, comme elle était bleue.

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Les invités : Maryse Hache

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Dans le cadre des échanges entre blogs du premier vendredi du mois je suis particulièrement fière que Maryse Hache, du si beau Semenoir et de l’Abyssal cabaret (que l’on peut désormais lire aussi sur papier), ait choisi de lever le voile ici sur un travail qu’elle entreprend autour d’archives familiales – je n’en dis pas plus, elle présente elle-même son corpus mais je lui exprime toute ma gratitude pour ce cadeau fait à L’employée aux écritures. Chez elle, on peut lire mon New York, jeu de miroir, reflet amusé de la ville dans laquelle je séjourne quelques semaines, accueillie au Remarque Institute, NYU. Comme d’habitude, la liste établie par Brigitte Célérier@brigetoun si vous préférez – aide à se repérer dans tous les échanges annoncés. Merci à elle aussi.

depuis un moment vagabonde en moi un chantier rêvé d’écriture autour des correspondances de mon père, (échangées avec ma mère, ils venaient de se fiancer)  pendant ses presque six ans de captivité dans un camp en silésie orientale

je choisis, avec l’accord bienveillant, de martine sonnet, et à l’occasion de ce premier vase avec elle, d’ouvrir ce chantier en ses terres et sous son égide

gratitude

que l’écriture aille son chemin

.

pour l’instant ça s’appelle (emprise)

(essaierai de trouver le “e” majuscule particulier à son écriture)

terme qui fera vignette de ce chantier au semenoir

ce mot, je l’ai trouvé écrit manuscrit sur un petit bout de papier esseulé dans ses affaires

on peut lire, écriture inversée typographique, dans le coin supérieur droit, une fin de mot : “…ons” peut-être une terminaison de verbe conjugué, et “inutiles”

énigme

la force émotive et éveillante du mot manuscrit, soudain offerte à nouveau à ma lecture, marque de la main, gestuelle de l’écriture, forme des doigts, des ongles, alliance et bague, est plus forte pour moi qu’une photo

plus dynamique


.

il  ne se doute de rien

sa blondeur sa jeunesse répondent à l’appel du service militaire

pour l’instant cavalier 2° escadron 29 novembre 1939 à st germain-en-laye

il a 21 ans

ne se doute de rien

.

.

sauf

ses yeux bleus ont déjà croisé les yeux marron de geneviève

elle a 27 ans

train ligne denfert-rochereau direction seine et oise

lui monte ou descend station orsay il habite chez ses parents

il travaille chez ses parents paris 14°

elle monte ou descend à deux stations de différence, c’est lozère

elle habite chez sa tante c’est plus prudent en ces temps incertains

elle travaille à paris

horaires réguliers du train

ils y sont souvent ensemble se voient se regardent

et c’en est fait d’eux

“je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue”

.

il a fumé quelques unes de “leurs” cigarettes

“les cigarettes sont épatantes”

.

.

“… vous remercier de votre aimable attention”

“Je vous écrirai plus longuement dans quelques jours”

.

.

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Montparnasse monde trompeur

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C’était donc cela, juste un revêtement sur boule synthétique cotonneuse moulée à la louche, quand on les avait crues éclosions moussues spontanées sur lits de galets (quelle promesse ce serait “à la carte” l’éclosion moussue sur son lit de galets, j’en ai l’eau à la bouche),

surgies dans le cadre d’un énième plan de verdissement de la gare, superbes, généreuses, rebondies, choufleuresques.

Ce qu’il en reste aujourd’hui, pauvres d’elles, sans naturel et pourtant caduques, annonces d’hiver et désolation.

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Le sens des mots n’a pas fini de nous échapper

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D’un nuancier entendu au téléphone

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Je regarde le nuancier, mon mari n’est pas là, mais je déciderai toute seule disait hier soir au téléphone ma voisine  de l’omnibus Sèvres Rive Gauche de 19h01 (depuis mon retour de vacances, quoi que je fasse, d’où que je vienne, je me retrouve tous les jours dans le train quittant le Montparnasse monde à 19h01) à un artisan qui avait fini de poser toutes les baguettes et cela rendait très bien, oui, elle en était contente même si elle ne le lui avait pas encore dit (et il s’en inquiétait).

Voisine d’âge moyen-mûr – je veux dire plus vieille que moi, mais au fond peut-être pas tant que cela -, à la mise discrète pour ne pas dire soumise, à qui l’on aurait donné le Bon Dieu sans confession. Mais sa détermination à choisir sans attendre le retour d’un mari en déplacement, donc hors de tout processus de concertation, la couleur nouvelle d’un décor partagé avec lui depuis des lustres prenait un tour transgressif qui faisait plaisir à entendre.

On sentait bien qu’elle ne prenait pas tous les jours de son propre chef une décision de cette importance et que l’artisan à l’autre bout du fil sans fil, habitué des longs conciliabules conjugaux au dessus de son nuancier, pouvait s’émouvoir d’une audace pareille. Si le dressing-room champagne ne plaisait pas à Monsieur, est-ce que l’on ne viendrait pas lui en faire reproche à lui qui n’aurait pas su doser le mélange des teintes avant d’y tremper son rouleau ? Plus rosé, le champagne, elle lui avait pourtant bien spécifié champagne rosé. Du moins le prétendrait.

Ecoutant ma voisine dont j’approuvais évidemment la résolution émancipatrice, je songeais que j’ai toujours été sensible aux nuanciers et autres albums d’échantillons de papiers peints ou de tissus, ces épuisements/mises à plat de toutes les valeurs possibles d’une couleur ou d’un motif.

Et je me souviens qu’à l’époque enfuie où l’on pouvait commander gratuitement des échantillons de tissus d’ameublement à la Redoute ou aux 3 Suisses je ne me privais pas de le faire, bien que n’en ayant nul besoin.

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Signes de vie

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A certaines heures

pas forcément les plus chaudes

traversant à vélo les villages

les signes de vie

il fallait les chercher longtemps

(tiens, Placide Ménage a changé de numéro de téléphone). Heureusement la recrudescence des pois de senteurs

la fière solidité des squelettes

et, jamais loin, les bêtes, accourues, curieuses.

Rhabillée de la tête aux pieds

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Pour Anne à qui je disais récemment qu’échouaient chez L’employée aux écritures de nombreuses requêtes d’internautes portant sur des questions vestimentaires, ces quelques échantillons.

Au rayon dames certaines sont prévoyantes, songeant déjà à acheter des robes d’hiver en France et même des robes d’hiver pour toujours – souci d’éternité que ne partage pas celle qui veut une robe de moins de trente ans. Mais l’été n’a pas jeté ses derniers feux et les estivantes tardives – comme moi qui ne suis pas encore partie en vacances – rêvent encore d’une robe pour se promener le soir à porter sous un chapeau avec cerises. Ma boutique est fréquentée aussi par des clientes lettrées, sensibles aux souffrances du jeune Werther et désireuses de porter ses couleurs. Sinon, pourquoi vouloir assortir robe bleue souliers jaunes ou se lancer dans la recherche éperdue d’une robe jaune et bleue longue d’occasion avec malheureusement un budget limité contraignant à devoir se contenter d’une seconde main ?

Je me demande si la robe billet de métro que je suis incapable de fournir procède du même principe de confection qu’une robe vue dans mon enfance – mais sur qui et dans quelles circonstances je ne m’en souviens plus – résultant d’un assemblage de cravates de soie cousues bord à bord. D’abord on ne remarquait que le chatoiement et la bigarrure, et puis la porteuse-créatrice de la robe révélait son secret : la longueur qui était bonne avec le chic de l’effet cranté et l’ampleur évasée pile poil conférée par la forme des cravates. La matière des tickets de métro s’y prête moins, sans parler de la patience de la couturière.

Au rayon hommes,  le vêtement de travail est bien porté, qu’il s’agisse du bleu de travail qui dit son usine, de la tenue professionnelle employé de rayon, qui dit son grand magasin (à ce propos, connaissez-vous le magnifique Calicot de Xavier-Edouard, Michel et Philippe Lejeune ?) ou du costume employé aux écritures XIXe siècle, dont les manchettes de lustrine s’usent sur les bureaux des ministères. Le dimanche et les jours fériés on se met sur son 31, on s’interroge sur le noeud papillon d’avant et de maintenant et, jusqu’à Montigny-le-Bretonneux, on cherche un gilet homme beau. La requête pour une robe de chambre homme n’est pas localisée mais proviendrait d’un Langrois que ça ne m’étonnerait pas, sans vouloir me mêler de ses affaires je lui déconseille toutefois de se défaire de sa vieille, il s’en mordra les doigts.

Une chose qu’il ne faut plus me demander, ce sont les jupes noires : le rayon est liquidé.

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