L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Questions de quoi remplir un caddy

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L’employée aux écritures n’est pas un catalogue de vente par correspondance, aussi je fais suivre à La Redoute à Roubaix – puisqu’à la Manufacture d’armes et de cycles de Saint-Etienne, c’est trop tard – la liste des commissions (que je ne me prive pas de commenter au passage) des internautes venus ici dans l’espoir déçu d’y trouver

des chaussures de pluie irlandaises : bien préciser la pointure lors de la commande et penser qu’un chapeau de pluie peut aussi être utile pour la ballade irlandaise (que je n’ai pas faite)

une robe de marquise : j’ai bien prêté ma voix à une marquise mais je ne rentrais pas dans sa robe et dans ma garde-robe photographique je n’ai que cette jupe de duchesse, sur strapontin de wagon de métro à défaut de tabouret

du carrelage de cuisine multicolore et du carrelage pelouse avec des marguerites : ici, on trouve plus aisément son bonheur en papier peint

un cd rom obsolète : vous aurez l’embarras du choix, le cd rom est intrinsèquement obsolète sauf pour faire peur aux oiseaux (croit-on) accroché aux branches des arbres fruitiers

un canevas Mickey : un beau paysage vous occuperait plus longtemps

un piquet clôture béton : personnellement, dans le paysage, j’aime beaucoup mieux ceux en traverses de chemin de fer

une chaussure noire à petits pois blanc : ne mégotez pas, prenez la paire (en tout cas, les miennes sont unies)

trois robes : si vous n’êtes difficile que sur leur nombre, vous devriez trouver assez facilement : mais au cas où,  j’en ai trois en magasin, certes un peu passées de mode

une maison algeco : difficile à faire rentrer dans un catalogue, ou alors il faudrait revenir à ces livres cartonnés dont tourner une page faisait surgir en le dépliant un décor en relief ; volume plus simple à contraindre pour un algeco que pour le château de la belle au bois dormant.

PS : il n’échappera à personne que j’ai la main lourde sur les liens internes à L’employée aux écritures : c’est tout simplement parce que plus la liste de ses archives s’allonge, plus l’inéluctable enfouissement des textes dans la si bien nommée fosse à bitume du blog me désole.

Scènes d’une boulangerie parisienne

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Les scènes se passent dans une boulangerie de la rive gauche, sur un boulevard de mon itinérance quotidienne Cette boulangerie n’a jamais été sympathique mais propose de bons financiers à la pistache et j’aime bien, d’une part, les financiers, d’autre part, tout ce qui est à la pistache.

Acte I, à la veille des dernières petites vacances de printemps de la zone C : comme je me trouve dans la boutique, les deux jeunes vendeuses parlent entre elles à mots couverts mais je comprends que leurs patrons les soupçonnent de distraire de la monnaie de la caisse.

Acte II, à la rentrée de ces même congés, jour de réouverture de la boulangerie : queue jusque sur le trottoir mais je prends mon tour et quand il arrive je comprends pourquoi l’attente et les étranges bruits de jackpot : une machine infernale dans laquelle il faut introduire ses pièces et qui rend automatiquement la monnaie trône sur la caisse ; personne n’y comprend rien et les vendeuses en réexpliquent le fonctionnement à chaque client.

Acte III : après avoir un certain temps évité la boutique, le jour où ma gourmandise l’emporte je paie mon financier à la pistache avec le plus gros billet à ma portée (20 euros) par esprit de rébellion contre une technologie prétendument hygiéniste à l’égard des clients mais surtout suspicieuse envers le personnel ; je constate qu’une affichette explicative a été collée sur l’appareil antipathique, spécifiant d’introduire les pièces LENTEMENT et UNE PAR UNE dans la fente (comme les billets de train dans les composteurs).

Acte IV, hier matin : je me demande si la machine a passé l’été, déroge à mon boycott et règle mon achat avec un billet de 5 euros – les temps sont durs ; mais grande est ma jubilation à la lecture de la nouvelle affichette apparue sur l’engin démoniaque, ajoutant aux recommandations antérieures la demande expresse d’attendre calmement le retour des pièces dues et de NE PAS TAPER SUR LA CAISSE.

Trop prise au dépourvu pour pouvoir photographier discrètement ; une autre fois peut-être. Et puisque j’y pense, à propos des boulangers parisiens, j’en profite pour suggérer de lire le beau livre que l’historien américain Steven L. Kaplan, a consacré à ceux du XVIIIe siècle, Le meilleur pain du monde : les boulangers de Paris au XVIIIe siècle.


D’autres villes, en “ange” ou pas

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Après celles d’Uckange et de Rombas, juste encore quelques images que je ne me résous pas à archiver sans partage

De Thionville, cette façade sur laquelle on cogne une fois la gare, aux convois interminables de lourds containers débarqués des ports de la vieille Hanse, laissée derrière soi et la rivière, aux péniches taillées à la même aune, franchie par un large pont. Premier immeuble en vue, seul de son espèce, sans même approximatives copies dans la ville.

D’Hayange, me crève les yeux ces jours derniers que les rails qui traversent ma gare de banlieue proviennent. HAYANGE, écrit dessus à intervalles réguliers, il me faudrait un zoom pour montrer. Je m’amuse du fait que je n’ai jamais lu cette inscription avant d’être allée là-bas.

D’Hagondange, dimanche, heure du déjeuner, l’immensité incongrue du parking devant la mairie et les voix des déjeuners familiaux échappées par les fenêtres ouvertes des maisons qui bordent la place. Il fait lourd, le temps est à l’orage, le verbe haut. Souvenir revenu de l’affiche de cette pièce de Jean-Paul Wenzel, que je voudrais tellement voir jouer ou au moins lire maintenant, Loin d’Hagondange, au mur d’un appartement ami dans les années 1970.

De Villerupt, le regret d’y passer hors saison du festival de cinéma italien dont l’hôtel de ville pavoise déjà la prochaine édition à l’automne. Et l’animation, voitures klaxonnantes aux passagers sur leur 31, causée par les deux mariages qui se succèdent en ce samedi après-midi, à la mairie puis à l’église, remplissant ici, un temps, les parkings.

D’Audun-le-Tiche, la compréhension immédiate.

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Pots de fer de Rombas (contre pots de terre)

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On les voit partout depuis quelques années ; les services “espaces verts” des collectivités territoriales en rafolent, comme les jardiniers des gares.

Je les avais toujours vus ronds, en terre cuite, exacte réplique agrandie (tout au plus vernissés et peints de couleurs vives) des modèles de format adapté à leur usage ancien : y faire pousser dans des conditions raisonnables d’enracinnement une plante verte d’intérieur ou une fleur sur un rebord de fenêtre, comme je le fais chaque printemps pour égayer de l’extérieur ma cuisine. Mais ceux du Montparnasse monde avec leurs malheureux arbrisseaux n’égaient rien du tout.

L’agrandissement du pot de fleur au service du décor urbain ou ferroviaire ne m’a jamais convaincue et me mettrait même plutôt un peu mal à l’aise comme toute démesure apportée aux objets du quotidien ou à leur représentation à des fins publicitaires ou pédagogiques.

Ce qui m’a fait vraiment plaisir, roulant à vélo la semaine dernière d’Hagondange vers Rombas, c’est que les pots géants qui là-bas nous signifiaient l’entrée de la ville se distinguaient radicalement de tous ceux croisés jusqu’alors. Ils sont à section carrée, en métal, et boulonnés à leur base, faisant ainsi honneur à leur pays de sidérurgie et à celles et ceux qui luttent pour le faire vivre.

A Rombas,  la pluie nous avait arrêtés longtemps et le PMU – seul refuge possible en ce dimanche après-midi -, et ses habitués nous avaient fait bon accueil. Au PMU, la table voisine de la nôtre était curieusement décorée d’une statuette représentant un François Mitterrand sur le nez duquel un farceur avait posé une paire de lunettes de soleil à branche cassée.

Belle lumière sur la route reprise  en sens inverse, de Rombas vers Hagondange, où la pluie avait tôt fait de nous rattraper. L’usine enjambant la route tournait : on l’entendait respirer. A Hagondange, nouvelle pause dans la boulangerie salon de thé face à la gare. Et s’apercevoir que cette boulangerie ouvre tous les matins dès 5 heures. Ici on se lève tôt.

Pour rester dans l’esprit de ce voyage, je signale que sur Face Terres… Daniel Bourrion a amplifié son Chant acier, devenu Chant acier 2

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Uckange U4 – approches

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Prendre son temps, passer d’abord voir la gare, fermée mais les Metrolor qui relient Luxembourg à Nancy s’y arrêtent,

et puis longer la cité d’Italie, en quête d’une vue d’ensemble, d’un peu loin,

tergiverser, parce que l’appellation “Parc du haut-fourneau Uckange U4” sur les affiches et brochures des offices de tourisme fait un peu peur. Inquiétude née du mot “parc” avec ce qu’il suggère d’attractions/répulsion.

Bien à tort, parce qu’après un long détour dans la ville pour trouver l’entrée, on se rassure très vite : le haut-fourneau est libre de tout adventice, juste le cheminement tracé pour en faire le tour d’aussi près qu’il est possible. Le tête à tête n’est troublé par rien.

Des deux chapiteaux, à distance, l’un, voiles relevées, abrite des enfants qui semblent préparer un spectacle, l’autre des expositions de photos qui ont tout à voir avec ce qui nous amène et une librairie où  se procurer le  Retour en Lorraine des photographes du bar Floréal ou le disque Chansons de la forge de Muckrackers.

Dans le temps même que je fais le tour d’U4, seul haut-fourneau conservé, classé monument historique en 2001, de tous ceux, éteints, qu’a comptés la vallée de la Fensch, j’en poste des photos via twitter auxquelles Daniel Bourrion, né pas loin de là, réagit. Sur Face Terres… cela donne son Chant acier. Merci à lui de trouver les mots qui vont avec.

Les jours suivants, repasser à Uckange et, du train cette fois, filmer (pour ne pas entendre les commentaires superflus, couper le son de préférence).

D’autres images (fixes) sur la page de mon site consacrée à U4, rubrique Portail des images.

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Noyade interdite

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Je sais bien que c’est une bouée de sauvetage, mode d’emploi superflu, juste écrit dessus, dans le blanc, le nom du port d’attache rendu peu lisible, non par le déchaînement des flots, mais par la succession des averses qui l’ont battue de plein fouet. Il n’y pas de vitre protectrice ni de petit marteau accroché à saisir pour la briser : ce serait perdre un temps précieux. Une bouée de sauvetage, objet utile s’il en est, qu’il y aurait lieu d’arracher au plus vite à son support pour lui faire remplir son office si les circonstances l’exigeaient ; toute autre considération, notamment d’esthétique paysagère, serait alors la plus malvenue, passible même de poursuites pour non assistance à personne en danger. Mais, franchement, je souhaite que nul, promeneur trébuchant sur un rivage sapé par les ragondins, pêcheur aux ambitions démesurées, désespéré aux semelles de plomb, n’y contraigne : dépourvue de son heureux contraste circulaire ma photo perdrait son petit charme. Rien de plus monotone que cette promenade autour du plan d’eau un jour vaquant d’août sans soleil, mais il faut bien, sur le soir, finir par se dégourdir un peu les jambes. De quoi se jeter à l’eau. Heureusement, tout est prévu.

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Montparnasse monde un peu ingrat

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Les travaux de la CPCU (Compagnie Parisienne de Chauffage Urbain) sur le parvis de la gare ont duré des mois ; parfois, des entrailles ouvertes s’élevaient des fumées,

je les ai surveillés le jour

je les ai surveillés la nuit

et croyez-vous que, le trou rebouché, au moment de refaire le bitume, ils m’auraient proposé d’apposer, pour l’éternité, l’empreinte de mes pas pressés dans le Montparnasse monde ?

pas du tout, dommage : les illustres voyageurs croisant dans ces parages m’auraient emboîté le pas – le beau cortège que nous aurions formé ;

mais bientôt, du bitume neuf, plus rien ne paraîtra.

Filed under Montparnasse monde

Chose qui existe encore dans une vitrine

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Je n’aurais pas cru : à ce point pareil à ceux qui ne parvenaient pas à tuer l’ennui des vacances d’enfance – mais il faut dire qu’ils étaient plus petits. Un canevas paysager, bien assorti à la saison estivale et à ses villégiatures, avec en marge le nuancier de toutes ses couleurs. Qu’on l’achète et  dépendu de la vitrine, posé à plat sur le comptoir, la marchande mercière s’empressera d’aligner horizontalement les écheveaux de fils (sortis de ses petits tiroirs plats) à côté des rectangles modèles, à la recherche de la teinte la plus proche ; il n’y a pas de repérage par numéro de bain. Pas moins de vingt coloris pour rendre au mieux ce rivage breton, ce qui en augmentera le prix. Trame dont les petits trous sont à remplir au demi-point de croix, ce qui prendra un certain temps et fera enfiler beaucoup d’aiguillées, extrémité des fils suçotée pour en unir les brins qui s’éparpilleraient au moment de passer par le chas de l’aiguille. Puis faire autant de noeuds, roulotés du bout des doigts, pour les arrêter quand les teintes nombreuses s’entremêlent, comme au  massif d’hortensias ou dans le bleu des flots bleus d’avant les algues vertes.

Je me demande quels autres objets témoins d’enfance ont aussi peu changé, en près d’un demi-siècle, que le canevas Royal Paris, made in France, auquel, même en cherchant bien on ne trouve aucun code barre, juste un copyright pour le dessin “original” (à la manufacture royale des Gobelins, on aurait dit le carton) comme si sa production avait résisté non seulement aux années, mais encore à toutes formes de certifications.

Le canevas, il lui suffit toujours d’être imprimé et d’occuper son monde pour exister.

(Enrouler sa toile, avec tous les écheveaux à l’intérieur, dans un torchon propre entre deux séances.)

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Des corps taillés à l’identique

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C’est une photo dans un journal daté d’avril 1967. Les fondeurs et les forgerons de la R.N.U.R. se montrent dans les rues de Billancourt, mécontents de la fin programmée de leurs ateliers, dont le fameux 62. De tous récents accords Peugeot/Renault, entérinent la délocalisation prochaine des fonderies et des forges de Billancourt à Hagondange et Mulhouse.

Dans le cortège, au troisième plan, à l’extrême gauche, un homme ressemble étonnement, de corpulence et d’allure à mon père, et sur sa tête le béret signerait l’identité. Mais la photo, même sur la coupure originale du journal, n’est pas de très bonne qualité. Subsiste un doute quant aux traits du visage, même si le port de tête rappelle le sien. C’est troublant cette ressemblance. Je recadre la photo de plus en plus serré, mais le peu de netteté s’en trouble à chaque fois.

Est-ce qu’un même labeur, aussi physique soit-il, peut à ce point façonner deux démarches et deux corps semblables, deux cages thoraciques exactement de la même ampleur ? Ou bien dois-je dissiper l’ombre de mes doutes et affirmer que c’est lui ?

C’est possible, après tout, il y travaillait encore pour six mois, à l’atelier 62.

Filed under la vie tout venant

Question résiduelle mais de poids

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Les moteurs de recherches qui savent le zèle déployé par L’employée aux écritures pour répondre aux questions orphelines (requêtes que nul ne se bouscule pour satisfaire) n’hésitent pas à lui en soumettre. Ainsi du saugrenu crématorium combien pèsent les cendres ?

Je ne sais pas m’en dépêtrer et saisis donc  la question à mon tour, afin de voir  au bout de combien de pages l’internaute a été dirigé chez moi. Parvenue à la dix-neuvième page de réponses sans m’être reconnue je renonce : je ne partage ni sa patience ni sa curiosité. Personnellement, je ne me pose pas cette question tous les matins (ni même un sur deux).

Faire, le moment venu (rien ne presse), le choix des cendres comme trace résiduelle laissée à ses continuateurs, me semble relever d’un louable souci de discrétion, sans que j’éprouve le besoin d’en peser, au delà du pour et du contre, toutes les conséquences. Et je fais confiance aux catalogues des professionnels pour fournir le réceptacle adéquat, qu’intègre et vif on ait combattu en catégorie poids lourd ou en catégorie poids plume.

Alors je me demande ce qui peut bien conduire à se poser une question pareille. Pragmatique, j’élimine néanmoins la recherche d’un tarif d’affranchissement pour une expédition en colissimo suite à l’augmentation des tarifs postaux entrée en vigueur le 1er juillet dernier.

Reste la crainte d’un excédent de bagages par qui profiterait des vacances pour transporter dans les airs, sous cette forme, un être cher réduit à sa plus simple expression, en vue d’une dispersion en mer ou du sommet d’une montagne.

Et sa variante : l’alourdissement  redouté d’un sac à dos arrimé sur de frêles épaules, pour peu que d’ultimes volontés aient spécifié que le sommet devait être atteint non au moyen d’une dépose hélico mais bravement gravi pédestrement.

A ces heures-là plus personne n’a le dos large. Et le poids comme la chaleur des cendres traversent les épidermes et toutes les épaisseurs, percent tous les matériaux.

On le sait bien pour se souvenir de la brûlure des dernières pages d’un livre fort.

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