L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Montparnasse Monde 40

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La gare nous tient à l’oeil, mais c’est bien réciproque. Du moins en ce qui me concerne, même si je crains toujours, usant de mon appareil photographique, que l’on repère en haut lieu sécuritaire mon manège et se méprenne sur mes intentions toutes pacifiques – pour ne pas dire affectueuses. Toujours est-il que mon acuité visuelle n’est nulle part aussi fine et que mon point aveugle m’en fait voir-là de toutes les couleurs (dans les limites du spectre de la gare). Plongée au coeur du monde Montparnasse j’atteins, à très peu de choses près, la vision panoramique qui confère à la mouche son caractère insaisissable. La seule qui permette de suivre cette roulette échappée de son essieu de valise, et tous à shooter dedans, sans la sentir, pieds insensibles, absorbés qu’ils sont par l’affichage tardif de leur TGV, partis comme un seul homme et la roulette, entre eux, de l’un à l’autre, et sur elle-même comme une toupie. La gare, pour un peu, je n’en croirais pas mes yeux.

Dans la gare, mes autres sens ne sont pas au repos, si l’on en excepte le goût* – sauf, cas peu probable, à me trouver là mâchonnant un chewing-gum pas trop vieux, mobilisant encore un peu mes papilles gustatives. Pour le reste, j’ai l’ouïe fine, l’odorat développé et la sensibilité au monde Montparnasse à fleur de peau. J’entends celle qui confie à son téléphone “quand je vois Marie-Louise avec son poulet, ça me remet les idées en place” – ce qui stimule en outre mes facultés cognitives puisque je me demande bien comment une conversation peut en arriver là. Je sens bien que la gare ne sent pas partout la rose – je marchais un soir le long d’un quai de banlieue avec P.A. en lui parlant d’écrire la gare et lui : “mais l’odeur, tu la sens, l’odeur ?”.  Et j’ai la chair de poule rien qu’à penser à l’ombre de la personne de l’accident de personne. Qu’on ne me dise pas que je nourris pour ce lieu une passion insensée, même si je cherche encore quel sens donner à mon entreprise : la gare, au fond, j’en attendais quoi quand j’ai commencé ?

*Voir Montparnasse Monde 34

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Montparnasse monde de vive voix (et à refaire)

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La ville ne bruit que de cela : Anne Savelli clôt sa résidence au 104 en nous invitant Sereine Berlottier, Pierre Ménard, Sébastien Rongier et moi à lire avec elle là-bas, salle 200, dimanche 28 juin à 17h. Après la lecture, à 18h30, nous nous retrouverons les unes et les autres autour de nos livres dans la librairie du 104, Le merle moqueur.

Anne et moi croiserons nos textes, nos voix et nos gares : Anne lira des extraits de Franck texte inédit dans lequel la gare du Nord joue un rôle de premier plan et moi des extraits de Montparnasse Monde tout entier bâti autour de celle que vous savez.

La veille de cette lecture, le samedi 27 donc, le feuilleton du samedi en sera à son épisode 40, qui fermera cette saison – comme on dit des séries TV. Merci à vous qui avez suivi.

Je me donne un peu de temps pour penser la suite de ce chantier, qui passe successivement par plusieurs états : des notes manuscrites prises sur un carnet de fond de sac depuis 3 ans maintenant, des ébauches de textes en fichier word, des développements et fignolages directement sur le serveur avant publication sur le blog, et enfin la reprise du tout en livre numérique aux éditions publie.net, livre lui même évolutif avec mises à jour… A celà se superpose l’investigation photographique qui a pris un peu le pas sur l’écriture et tiré celle-ci “à flux tendu” ces dernières semaines.

Sans souci de régularité de livraison hebdomadaire et sortie des appariements deux textes/une image, je souhaite chercher de nouveaux agencements, inventer des continuités, sérier les registres, bref refaire le monde. Tout cela dans mon arrière-boutique avant que ce soit un peu présentable (si jamais ça doit le devenir un jour) sous une forme ou sous une autre.

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Montparnasse Monde 39

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Les salles d’attente de la gare je ne les fréquente pas puisque la (dé)raison d’être de ma présence en ce lieu ne se réduit jamais à la perspective d’un train. Mais, à supposer que je rentre un jour dans le rang des usagères ordinaires, ma carte escapade ne m’ouvrira pas leur saint des saints : le salon « Grands Voyageurs » qui dispense à ceux-là, exclusivement, ses honneurs et aménités. Avec obséquiosité, du moins vu, au dérobé, de l’extérieur : le salon ne s’ouvre sur l’accès latéral Commandant Mouchotte qu’au moyen de meurtrières horizontales vitrées sécurité. Pour la tranquillité et l’entre soi de ceux à l’intérieur. Je respecte la distance de courtoisie (comme au guichet de la Poste) et ne colle pas l’objectif de l’appareil photo sur un rai ajouré. Sans faire de paranoïa excessive, escapade et Grand Voyageur, c’est un peu torchon et serviette. Je me demande pourtant si mon entreprise d’écriture ne justifierait pas l’obtention d’un mot de passe dérogatoire, au moins à usage anthropologique. Je ne cherche pas à me faire plaindre, mais dans la gare, je n’ai pas forcément tous les atouts dans mon jeu.

Dans mon bureau au dessus des voies, je ne voyais pas le temps passer. Tout d’un coup, il pouvait être 7 heures du soir, voire plus tard encore, et je devais me sauver : les courses, la cuisine. Je n’étais jamais restée aussi tardivement dans aucun des bureaux par lesquels j’étais passée. Et je n’en rentrais pas fatiguée. La gare, le bureau, le jardin et moi, nous formions un écosystème. J’étais bien et je n’étais pas la seule : nous étions tous bien ensemble au dessus de la gare Pasteur, tous angles arrondis, sur les voies 1 à 9 ; nos fenêtres côté jardin. Même les chargés de mission que leur archéologie familiale ne scotchait pas, comme la mienne, à la gare, vivaient avec elle en parfaite harmonie, recourant à ses nombreux services – intrinsèquement ferroviaires ou adventices – autant que de besoin. Qui descendait acheter le journal ; qui des cigarettes ; qui un billet de train ; qui un sandwich si vraiment pas le temps d’aller plus loin ; qui y garait sa voiture un jour exceptionnel nécessitant une voiture (par exemple pour y transporter du matériel et des provisions de pique-nique). Et toujours proposer aux autres d’en profiter : se rendre mutuellement service et avec la gare. J’ai beaucoup aimé cette vie-là, mon petit éco-système dans notre symbiose générale.

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Troisième voyage à Cognac (et retour en pays mellois)

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La première fois que je suis allée voir Le temps qu’il fait à Cognac, à l’automne 2007, c’était pour faire connaissance et reporter les premières épreuves corrigées d’Atelier 62 (et j’en revenais ayant appris magistralement de Georges Monti que les virgules, quoi qu’on fasse, vont par deux). La deuxième fois, en janvier 2008 j’y étais allée pour préparer l’envoi du service de presse du livre (mais nous étions tristes ensemble, Georges, Marie Claude Rossard et moi, parce que le lendemain je portais ma mère en terre).

La troisième fois, jeudi dernier, j’étais invitée par Le texte libre, librairie associative bien engagée, pour y parler du livre – qui cette fois encore suscitera facilement les paroles des uns et des autres, et les croisements d’itinéraires. Et la règle qui veut qu’à chaque rencontre un fils ou une fille de forgeron soit présent est une fois de plus respectée : je n’aurais jamais imaginé que nous étions aussi nombreux.

Arrivée à Cognac, flânerie à pied avec Marie Claude de la gare à l’ancien chais qu’occupe la maison d’édition où nous nous arrêtons avant de rejoindre la librairie. Le temps d’une discussion sur les écritures en cours, ce qui les porte et les supporte, les manuscrits empilés, et de faire une petite provision de livres à rapporter. Deux tous récents, Zozo chômeur éperdu de Bertrand Redonnet et A l’immortelle Bien-aimée de Virginie Reisz, deux plus anciens, Couteau suisse de Denis Montebello et Ouailles de Jean-Loup Trassard. De Trassard je rapporte aussi le très beau petit Coutumes incertaines, avec photographies, hors commerce. Avec Marie Claude, nous nous faisons la réflexion que Montebello, Redonnet et moi figurons à la fois au catalogue du Temps qu’il fait et à celui de Publie.net et que c’est une heureuse interférence.

Après une nuit dans le très beau moulin de Prézier – je m’y sens un peu en vacances – direction les Deux-Sèvres, pour une lecture apéritive d’extraits d’Atelier 62 sur fond d’outillage en provenance de la boutique paternelle, remis en état et en service pour certains à Verrines-sous-Celles dans l’entreprise Poget. Il y a même semble-t-il dans l’équipe des vocations rentrées de forgerons qui se sont révélées à l’occasion de l’arrivée des machines et outils.

Lecture de l’atelier in situ faite, déjeuner quelques kilomètres plus loin au très ambiant Café du Boulevard à Melle, petite ville retrouvée avec plaisir et dans laquelle je me demande toujours comment la densité en habitants sympathiques peut être aussi élevée.

En chemin, arrêt églises romanes à Aulnay et Verrines, entourées l’une comme l’autre de magnifiques cimetières, et retour TGV par Saint-Maixent (pas de changement contrairement à l’aller, donc pas de café Au buffet de la gare d’Angoulême, lieu mythique : j’y retournerai.)

Montparnasse Monde 38

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Dans la gare, les kiosques déclinent Ouest France dans toutes ses éditions, du moins en début de journée : le nombre d’exemplaires proposé de chaque version est relativement restreint alors l’éventail se resserre au fil des heures. Feuilletage fébrile des coins supérieurs gauches des journaux, rangés pliés en quinquonce sur les présentoirs, jusqu’à en extirper celui qui vous parlera vraiment de vous. C’est à l’occasion des décès dans les familles bretonnes ou normandes dont une génération précédente a migré vers la capitale que cette opportunité est la plus précieuse. Le jour de la parution de l’annonce dans le journal – qui ne saurait être que celui-là – courir à la gare faire la tournée des kiosques pour acheter le nombre d’exemplaires permettant à chaque proche de l’archiver. Une mission qui m’a été confiée plusieurs fois, concernant la variante Bocage Sud –  qui n’existe plus, le bocage du Domfrontais est désormais couvert par une édition au périmètre élargi baptisée sobrement Orne -, avec un exemplaire en moins à acheter à chaque fois. La gare, lieu de passage obligé dans la réalisation de nos morts.

Dans la gare des choses apparaissent, se transforment et disparaissent sans qu’on s’en aperçoive – seulement après coup et personne pour dire alors quand ça s’est passé. Cherchant à y photographier un bel étalage de Ouest France, je m’aperçois qu’on ne trouve plus ce leader de la PQR (pour parler comme l’OJD), dans tous les kiosques et, incidemment,  que le magasin de vêtements 0-14 ans « Tout compte fait », niveau parvis secteur banlieue, évoqué dans ces colonnes il n’y a pas si longtemps* a laissé place à une parapharmacie. Sans prévenir, mais probablement suite à une étude de marché qui aura montré que tous les enfants des Transiliens avaient grandi et que le mood n’était pas à en lancer d’autres sur des rails incertains. Mais qu’en revanche les parents de ceux qu’on avait un temps habillé là avaient besoin à leur tour qu’on prenne soin d’eux, qu’on les embellisse, qu’on les illusionne. Je demande autour de moi : personne ne sait à quand remonte cette métamorphose commerciale – ni au juste, ni approximativement. Que des gens qui ont pourtant, comme moi, un usage quotidien de la gare. Si le monde Montparnasse se déplace en même temps que je l’écris, je n’aurai jamais fini.

* Voir Montparnasse Monde 11

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Dernières nouvelles des bibliothèques d’Alsace

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Trois jours en Alsace, à l’invitation de l’IRCOS (Institut régional de culture ouvrière et de service – elle y tient, à juste titre, au développé du sigle, Denise Stodel qui avait tout parfaitement organisé, merci à elle), pour y parler d’Atelier 62 dans le cadre du prix littéraire inter-CE auquel les forgerons participent.

Trois jours de rencontres dans des bibliothèques qui avaient toutes la particularité d’être installées dans des locaux industriels réhabilités et se prêtaient donc particulièrement bien à la lecture de ce livre et à nos échanges.

 

 

Jeudi 4, c’était à Mulhouse, dans la bibliothèque universitaire de la Fonderie, implantée avec d’autres équipements universitaires et culturels dans un ancien bâtiment très impressionnant de la SACM (Société alsacienne de constructions mécaniques). Des lecteurs qui ont autrefois travaillé sur le site sont venus nous expliquer, pleins d’émotion, ce qu’ils y fabriquaient et à quel endroit précisément.

 

 

A Colmar, le lendemain, changement d’univers : la bibliothèque universitaire du Grillenbreit est installée dans l’ancienne usine textile Bergas Kiener et autour de sa cheminée. Les forgerons de Billancourt sont là chaleureusement accueillis, et pas seulement parce qu’on s’assoit autour de la cheminée, par Annie Schaller, responsable du SCD de l’université de Haute-Alsace et son équipe. 

 

 

Enfin samedi 6, c’est à la médiathèque André Malraux, qui occupe elle un bâtiment de l’ancien armement Seegmuller sur le port rhénan, que j’intervenais, après une visite des lieux guidée par l’enthousiaste équipe patrimoniale. Equipe avec laquelle nous sommes probablement appelées à nous revoir.

 

 

Trois réhabilitations de locaux industriels en bibliothèques, également soucieuses de porter et partager avec leurs publics la mémoire et la parole ouvrière de leurs origines, sans hésiter même à l’écrire en toutes lettres sur leurs murs.

 

Montparnasse Monde 37

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Souvenir du Jardin Atlantique et du temps de la pièce 2071. Nous prenions souvent le café d’après déjeuner, tous ensemble, à la terrasse discrète (à l’enseigne renversée) de la cafétéria des tennis, du moins dès que le temps permettait au tenancier de dresser dehors tables et chaises. Une terrasse peu visible des simples traverseurs du jardin et fréquentée par les seuls connaisseurs qui savent que le port d’une raquette n’est pas du tout requis pour y accéder. Nous arrivions à six ou huit – nous formions un vrai collectif de travail – et commencions par glaner poliment des chaises en nombre suffisant autour des quelques tables occupées par des tablées incomplètes. Se posait ensuite la question de l’ombre et du soleil : qui voulait quoi ? La terrasse n’est pas très ombragée (seulement par des haies peu élevées qui la séparent un peu du reste, en particulier des poubelles) et comme sur tout je jardin le soleil donne fort et réverbère d’une façade l’autre. Qui avait dans sa poche ou son sac une paire de lunettes de soleil ? et moi toujours arrangeante : ça ne me dérange pas, les verres de mes lunettes se teintent. Et pour ce qui était de se prémunir des insolations, aux beaux jours, notre chef portait élégamment le panama.

Autre souvenir du Jardin Atlantique et du temps de la pièce 2071. Vers  six heures du soir, à la belle saison, quittant mon bureau pour rejoindre l’omnibus Sèvres Rive Gauche par le hall Pasteur, je croisais des grappes d’enfants accrochées aux poussettes (doubles ou triples parfois) de nourrices – comme on dirait en famille, mais assistantes maternelles agréées en langage CAF ou URSSAF -, quittant le jardin en remontant l’allée de la Deuxième D.B. (pour appeler ces lieux par leurs noms que personne ne connaît et y remédier). Des femmes sombres et des enfants clairs, si bien que je me demandais un peu où étaient leurs enfants à elles pendant ce temps-là, si elles en avaient. Il y avait des écoliers d’après la classe, qui marchaient à leurs côtés, et des bébés gardés tout le jour. Elles quittaient le Jardin Atlantique, marche posée, souvent quatre ou cinq de front derrière leurs poussettes lestées aussi de cabas contenant les couvertures repliées sur lesquels les plus petits avaient fait la sieste à l’ombre – elles s’installaient toujours en rond sous les arbres – et de sacs isothermes. Piques-niques et goûters, jus d’orange, biberons, rouleaux d’essuie-tout. Tout le nécessaire.  Le front des poussettes et ses grappes se défaisaient sitôt passé la place des Cinq Martyrs du Lycée Buffon ; chacune de son côté et les enfants égrainés en chemin, et oui, ça a bien été aujourd’hui.

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Question de mai avec poignée de cerises dans un chapeau

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Les questions de mai, j’en fais ce qu’il me plait, alors je ne m’intéresse qu’à une seule, jolie et bien de saison comment cueillir des cerises ?

Réponse : courrez voir ou revoir Le genou de Claire d’Eric Rohmer, film qui dispense la plus exquise leçon de cueillette de cerises de toute l’histoire du cinéma. 

Claire sur son échelle, dans l’arbre, et Jérôme, avec son chapeau, sous l’arbre, oeil à hauteur de genou : du genou, de Claire, le justement fameux.

Ce film, je l’ai vu dès sa sortie, en 1970, comme Elise ou la vraie vie de Michel Drach sorti la même année, mais celui-là enfoui dans ma mémoire jusqu’à ce que l’écriture m’y ramène. Adolescente toute ouïe à l’écoute du cinquième conte moral de Rohmer, je m’identifiais à ses personnages de jeunes filles, bien sûr, mais me projetais aussi, et pas qu’un peu, dans celui d’Aurora, la romancière manipulatrice…

“Historiquement” Le genou de Claire, Ma nuit chez Maud et Le beau mariage, sont mes trois films de Rohmer préférés et j’ai été très heureuse l’année dernière d’avoir l’occasion de parler avec leur monteuse Cécile Decugis, également monteuse, avant ceux-là, d’ A bout de souffle. C’est dire si j’étais dans mes petits souliers lorsque nous avons ensemble regardé chez elle des images qu’elle tenait à me montrer, tournées par elle en 2004 et 2005 autour de l’île Seguin. Tout se tient.

Depuis 2007, à mes trois films rhomériens -difficile de dire anciens- préférés, j’ajoute bien sûr Les amours d’Astrée et de Céladon, source de grand émerveillement et oeuvre magistrale de jeunesse du réalisateur

Les Six contes moraux, quand on les aime au cinéma, sont aussi très agréables à lire. Sur mes étagères l’édition originale de L’Herne en 1974, mais je m’aperçois qu’ils on été réédités plusieurs fois.


Montparnasse Monde 36

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Relevé archéologique dans la gare. Ce quadrilataire incertain au sol du hall principal, niveau parvis, côté Pier Import : trace résiduelle du kiosque de la Loterie nationale (puis Française des jeux) longtemps édifié dans ces parages ? J’ai trop fouillé de fonds de cabanes néolithiques et de campements magdaléniens pour ne pas me poser la question. Mais ici ni lit de galets, ni trous de poteaux, ni vestige fugace comme un ticket, même perdant, ayant échappé à la vigilance des robots nettoyeurs et qui permettrait d’envisager une datation. Investigation nécessaire, parce que ce kiosque, dont je n’ai jamais eu l’usage, je ne saurais dire quand il a disparu. Chaque vendredi 13, chaque mercredi et chaque samedi à dater de l’invention du loto s’en dévidaient d’impressionnantes files humaines, espérantes et désespérées à la fois. Longueur et fébrilité de la file d’attente inversement proportionnelles au chemin que les aiguilles des horloges avaient encore à parcourir sur leurs cadrans pour atteindre le fatidique 19 qui sonnerait l’arrêt des validations. Je me demande s’il arriva un jour qu’un usager, descendu de son train pauvre comme Job, sa transaction conclue avec le kiosquier soit sorti de la gare riche comme Crésus, mais l’ignorant encore. Et ce qu’il advint de lui et de sa bonne ou mauvaise fortune par la suite.

Calculs de probabilités à effectuer sur le terrain (l’usage de la calculette type collège est autorisé). Probabilité qu’un voyageur régulier des voies 10 à 17 gagne la super cagnotte du Loto du prochain vendredi 13. Probabilité que tous les trains attendus en gare principale comme en gare de Montparnasse-Vaugirard un jour ouvrable, qui reste à définir, arrivent à l’heure. Probabilité qu’un jour J à un instant T toutes les valises à roulettes présentes dans la gare s’immobilisent, cessant enfin leur raffut. Probabilité que le fantôme d’Harold Lloyd soit suspendu, invisible, aux aiguilles de l’une des horloges de façade, côté – Arrivées ou Départs – indifférent, pour multiplier ses chances par deux. Probabilité que la voix féminine mécanique copiée collée de la gare se mette à chanter La voix humaine de Francis Poulenc suite à une incivilité facétieuse. Probabilité que le chef de gare m’attende un matin au bout de la voie 14, bouquet de fleurs à la main, et me remercie pour mes bons et loyaux services de défense et illustration de son lieu de travail.  Probabilité que deux lecteurs fidèles de Montparnasse Monde se croisent dans la gare, par effet heureux du hasard – objectif ou pas – se reconnaissent et clignent de l’œil.

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La Rochelle (aux lions, aux fraises et aux échafaudages)

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De retour à La Rochelle, où le CREDES et la médiathèque accueillaient hier soir Atelier 62 – soirée calme : la fête des voisins par temps clair, comme dirait Philippe Annocque,  semble être pour les livres et leurs auteurs une concurrence aussi rude qu’un événement rugbystique mondial ou l’arrivée du beaujolais nouveau, rivalités éprouvées par les forgerons l’année dernière – j’ai remis avec le plus grand plaisir mes pas dans ceux d’octobre dernier, quand j’avais embarqué Quai des lettres avec Denis Montebello.

Mais un endroit où je n’étais pas allée à l’automne, c’est le Café de la Paix, que je ne connaissais pas, n’ayant jamais lu Georges Simenon (je sais bien que j’ai tort) et que j’ai découvert ce matin, dans toute sa dimension historique, littéraire et décorative.

J’y ai pris  quelques photos, spécifiquement dédiées à l’ami PdB, parce que dans ce café il y a des lions, là où on ne les attend pas forcément, dans les toilettes, et que PdB collectionne les lions. D’abord je n’ai vu que le décor de la chasse d’eau, qui a lui seul méritait déjà tout mon respect.

 

Mais, cherchant à le photographier sous son meilleur angle, il m’est apparu qu’un lion était couché sous la cuvette et que le reste de la horde dormait sous les lavabos.

Sortant de là, je suis allée faire un tour au marché, dont j’ai retrouvé le chemin en suivant un couple de paniers fusionnels – déroutants sur la fin parce qu’ils sont passés par le bureau de poste -

mais guidée par le parfum délicieux du plus bel étalage de fraises (maras des bois) jamais vu, j’y suis tout de même arrivée.

Retour à la gare provisions faites de sel, de miel, de pommes de terre et de chocolats, déplorant la fragilité des fraises et bien curieuse de savoir où en étaient les prouesses des échafaudeurs locaux. Arrivée hier depuis Niort en voiture, je n’avais pas eu l’occasion de revoir les magnifiques échafaudages de la verrière de la gare qui m’avait tellement impressionnée lors de mon précédent passage.

 

Je n’ai pas été déçue. Ils sont toujours là et les travaux avancent.

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