L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

RSS Feed

"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Archives for variétés parisiennes

Grands airs pour filets d’air

Comments Off

Parmi les choses (assez nombreuses) que je ne peux m’empêcher de photographier quand j’en croise sur mon chemin dans la ville, il y a ces plaques ouvragées d’aération de caves que l’on rencontre au soubassement de certains immeubles. Si la plupart de ces dispositifs contrant le développement des moisissures en sous-sol se contentent d’être strictement fonctionnels, alignant sans prétention leurs rangées de petits trous ronds, il en existe aussi de plus ambitieux, exposant leurs découpes savantes. Ce sont ces plaques/grilles que j’engrange, celles qui se donnent de grands airs pour un filet d’air, en me demandant si s’exprimaient dans leurs dessins, à l’emporte-pièce, des fantaisies d’architectes ou si ces motifs ornementaux se choisissaient sur catalogues de tôliers métaliers, en prêt à poser.

Echantillon de ma collection avec effets tulipes et grappes de raisins.

Ajout du mardi 20 février : ce matin le blog ami “Pendant le week-end” vous en propose aussi (avec localisation et touche végétale)

fév 18, 2018

Sophie Calle orpheline tout à fait

Comments Off

Au musée de la Chasse et de la nature (où je n’avais jamais mis les pieds) se tient jusqu’au 11 février prochain l’exposition Beau doublé, Monsieur le marquis !, confiant ses étonnantes collections aux bons soins de Sophie Calle et de son invitée la sculptrice Serena Carone. C’était bien la première fois que si j’avais été détentrice d’un permis de chasse j’aurais bénéficié du tarif réduit pour visiter une exposition - aucun regret pour autant de n’avoir pu m’en prévaloir à la caisse. Ce n’était pas la première fois en revanche que je visitais une exposition de Sophie Calle en me disant qu’il fallait absolument que L’employée aux écritures en parle. Forts souvenirs de Prenez soin de vous dans la salle des Imprimés de la chère vieille BN de la rue de Richelieu (qui avait donné matière à l’un des tous premiers billets de ce blog), comme de l’installation RACHEL MONIQUE au Palais de Tokyo également évoquée. D’ailleurs Monique la girafe a fait le voyage de l’atelier de l’artiste au musée de la Chasse comme elle l’avait fait au Palais de Tokyo. Retrouvailles.

L’exposition actuelle ne saurait se voir sans raviver l’empreinte de RACHEL MONIQUE parce que, comme la mère de l’artiste, en sa fin même, habitait cette installation, l’une des salles de Beau doublé, Monsieur le marquis ! respire des ultimes souffles de Bob, son père, de derniers mots possibles, suspendus, en dernier mot point final. Et au bouquet de soucis que la fille tendait à sa MOTHER se substituent trois reines marguerites pour son FATHER.

De ses contacts proches qui ne répondent plus, mère, père et tant d’autres cisaillés du fil des ans, de ses adresses à effacer dans ses agendas et autres répertoires, Sophie Calle ne sait pas trop quoi faire, cherche la méthode, nous consulte,

finit par nous poser directement la question, ouvrant un livre blanc dont elle nous invite à couvrir les pages,

moi j’ai répondu : “Je les écris pour les partager avec vous”.

Quant à ce que Sophie Calle et Serena Carone ont astucieusement éparpillé dans les autres salles du musée, je vous laisse les surprises. Juste souligner le bonheur de réemboîter le pas de la Suite vénitienne, de retrouver là, sorties du livre (un de mes livres de chevet), Des histoires vraies et combien il y aurait à dire à propos des textes de l’installation Le Chasseur français, saisissant survol, de décennie en décennie, de 120 ans de petites annonces d’hommes à l’affût. Profitez comme moi de la nocturne du mercredi : excellentes conditions pour visiter tranquillement en prenant le temps de tout lire.

jan 4, 2018

Des savoirs encombrants (et de l’obsolescence)

Comments Off

Comme je passais hier soir rue Saint-Jacques, avait été déposé sur le trottoir, sensiblement à hauteur de l’abbaye du Val-de-Grâce et au coin de la place Alphonse Laveran, ce carton contenant une édition sans doute complète de l’Encyclopedia universalis. Pour s’en débarrasser parce que, probablement, aucune autre solution n’avait été trouvée quand il s’était agi de vider un appartement ou une cave – c’est fou ce qu’il se déverse des logements sur les trottoirs ces mois d’été à Paris, sans que les videurs ne cherchent de voies de recyclage pour ce qui peut encore servir ni ne fassent appel aux services compétents pour le reste. A se demander souvent quels liens unissaient les possesseurs des choses étalées sur la voie publique et les évacuateurs, et quand il s’agit, comme souvent, de se défaire d’un héritage encombrant, quelles rancoeurs voire quelles vengeances se libèrent dans ces expositions à touts vents. Mais là, l’Universalis, tout de même, me donnait encore plus à penser et pas seulement parce que la veille, distraction estivale de dix-huitiémiste, j’avais achevé la lecture du roman d’Arturo Pérez-Reverte, Deux hommes de bien, racontant les tribulations de deux membres de l’Académie royale de Madrid envoyés à Paris, peu avant la Révolution, se procurer, pour la bibliothèque de l’Académie, les 28 volumes de l’édition originale de l’Encyclopédie, l’autre, celle de Diderot et d’Alembert (et collaborateurs). Le carton dans lequel je butais hier signifiait crument qu’on ne sait plus quoi faire de la version imprimée d’une somme de connaissances rassemblées sur le papier il y a un demi-siècle, continuée et mise à jour sur d’autres supports et désormais en ligne. Soit, ces volumes sont plus lourds et moins maniables qu’une tablette, mais plus personne, nulle part, vraiment, pour avoir envie de les feuilleter ? Ce qui me chiffonnait encore, dans l’abandon dont j’étais témoin rue Saint-Jacques, rue originelle des imprimeurs parisiens, c’est que je me souvenais de l’investissement que l’achat (à crédit) de l’Encyclopédie universalis avait pu représenter, dans certaines familles de mes camarades de lycées dans les années 1970, d’une certaine fierté qui allait avec, et de l’invitation faite par ses possesseurs aux moins nantis (dont j’étais) à venir préparer chez eux leurs exposés en partageant cette ressource documentaire convoitée. Ce n’était pas rien, l’alignement de ces volumes au bas d’un meuble bibliothèque, ça en jetait (avant qu’on ne les jette).

août 5, 2017

Boîtes à lettres mortes

Comments Off

Que je n’aime pas ces outrages, ces fins de non recevoir opposées, à grand renfort de scotch maison, à nos belles lettres ! Moi toujours à attendre le passage du facteur et déçue à chaque fois que j’ouvre une boîte vide, moi maniaque du courrier sous toutes ses formes et à titre personnel comme à celui d’historienne faisant souvent son miel d’échanges épistolaires de longue date décachetés. Je souffre avec ces deux boîtes, becs cloués, de la grande Poste du boulevard du Montparnasse que la mainmise d’un promoteur sur le bel édifice commandé à l’architecte Michel Roux-Spitz à la fin des années 1940 par  l’administration du TELEGRAPHE POSTE TELEPHONE, pour y loger sa direction parisienne, a condamné à leurs dernière levée. La cachet de la Poste n’est plus ce qu’il était.

PS  : ce mercredi un complément historique illustré de ce billet nous est gracieusement offert par Pendant le week-end.

juin 12, 2017

En passant par la rue Poulletier

Comments Off

Passant hier par la rue Poulletier, dans l’île Saint-Louis, pour rejoindre sur le quai d’Anjou l’hôtel de Lauzun où se tenait le colloque Paris et ses peuples : sociabilités et cosmopolitismes urbains au siècle des Lumières, au numéro 5 bis, je repère cette porte verte, peinte de frais,

et m’émeut en déchiffrant l’inscription au fronton, Dieu merci conservée,

parce que les écolières de la charité de la paroisse Saint-Louis-en-l’Ile et leurs maîtresses (des soeurs de Saint-Vincent-de-Paul, dans la place depuis 1658), je ne connais qu’elles. Je les ai tellement fréquentées, à fureter dans leurs archives, quand j’écrivais ma thèse sur “L’éducation des filles à Paris au XVIIIe siècle” ! Il était 9 heures du matin quand j’ai pris ces photos et je n’ai croisé personne, ce n’était par leur heure : les écolières de la charité venaient là de 8 à 11 le matin et de 2 à 4 l’après-midi en hiver, de 2 à 5 en été. Un décalage horaire saisonnier pour ne pas livrer les fillettes à la nuit trop noire. Principe de précaution (déjà).

Deux classes dans l’école : La première sera composée d’enfants d’environ sept ans et au-dessous auxquelles on apprendra les éléments du catéchisme, à connaître les lettres, à épeler et à former les lettres. La deuxième des filles au-dessus de cet âge, dans laquelle on apprendra le catéchisme, à lire en français et en latin, à écrire et à compter tant aux jetons qu’à la plume. Un programme, édicté par le Règlement pour l’école de charité des filles de Saint-Louis-en-l’île imprimé chez Josse en 1713, auquel souscrit le curé de la paroisse quand il demande à la maison mère des Filles de la Charité de lui envoyer une nouvelle institutrice : J’espère que vous nous choisirez une fille habile et entendue, qui puisse montrer à nos enfants la lecture et l’écriture avec l’arithmétique pour les pouvoir apprendre à compter et à jeter. Je ne vous parle pas de catéchisme et des instructions chrétiennes car vous savez bien que c’est ce qui doit marcher avant toutes choses (1716, AN S 6160).

Quant aux fillettes, même si le Règlement, en son article IX, précise On ne recevra à l’Ecole de charité que les filles des Pauvres et les écolières seront exclues lorsque les parents auront le moyen de les mettre aux autres écoles qu’à celle de Charité ce ne sont tout de même pas les plus démunies du quartier : tout simplement parce qu’il faut que la subsistance familiale puisse se passer, au moins temporairement, de l’appoint du menu gain d’un travail enfantin.

Je n’avais pas l’usage quotidien de la photographie, qui est devenu le mien grâce aux prodigieux outils dont nous disposons désormais, quand je travaillais sur ma thèse. Aussi, les traces dans la ville des lieux que je visitais alors “en archive” je ne les ai jamais collectées. Mais il n’est pas trop tard pour le faire et la prochaine fois que je passe à l’angle des rues de Vaugirard et Bonaparte, je photographie les quatre colonnes du jardin des filles de l’Instruction chrétienne que j’ai à l’oeil depuis longtemps.

Additif : la porte avant repeinture est à voir dans le billet Oublier Paris #69, complément, savamment illustré comme toujours, de Piero de Belleville que L’employée aux écritures remercie et félicite pour son espièglerie.

mai 20, 2017

Le temps retrouvé c’est une banque

Comments Off

J’ai souvent, dans les années 1980, acheté au “Temps retrouvé” mes agendas, ce qui me semblait logique et de bon augure. Mais voilà que cette antique librairie-papéterie de la rue Saint-Jacques, tout près du croisement avec la rue Soufflot (sur la droite en regardant dans la direction de Saint-Jacques-du-Haut-Pas), fermée, local à l’abandon, depuis belle lurette, se convertit en banque, par capillarité avec l’établissement qui la jouxte. Il me semble ne pas l’avoir vue ouverte, avec ses bacs à livres sur Paris et ses présentoirs à cartes postales sur le trottoir, depuis que je suis revenue travailler dans ce quartier en 2008 (mais je me trompe, voir ci-dessous et surtout ici). Elle fonctionnait en revanche lors de ma première période d’activité dans les parages, de 1981 à 1989. Le seul livre que je suis sûre d’avoir acheté là – soldé ? – c’est un Paris au fil du temps : atlas historique d’urbanisme et d’architecture, par Pierre Couperie (Joël Cuénot éditeur) toujours avec moi et que je consulte encore. Dans la même collection, plus tard et ailleurs, je m’étais procuré le volume consacré à Rome après y être allée pour la première fois au printemps 1985 à l’invitation de l’Ecole française. Tout ceci pour dire que si l’on savait déjà que le temps c’est de l’argent, le temps retrouvé c’est encore plus d’argent, c’est même une banque. Normal :  les intérêts ont couru tout leur soûl.

Additif correctif :  le billet complémentaire illustré du blog ami Pendant le week-end remet les pendules à l’heure : “Le temps retrouvé”sous forme de librairie à l’enseigne bien lettrée n’a fermé qu’en 2012.

mai 17, 2017

D’un magasin spécialisé disparu

Comments Off

Dans l’arrondi, entre rue Saint-Dominique et boulevard Saint-Germain, en lieu et place de ce si voyant magasin de chaussures pour enfants, tellement trop blanc, il y en a eu longtemps un autre qui, si je ne me trompe, avait pour seule enseigne “VETEMENTS POUR PAYS CHAUDS”. Il ne s’appelait pas autrement. Et de l’autobus 94 dans lequel je me trouvais allant à, ou revenant de, mon bureau alors situé du côté du boulevard Haussmann, j’en regardais les étalages, perplexe, me demandant à partir de quelle durée de séjour il devenait pertinent de se vêtir (sans aucun doute fort coûteusement) à cette adresse en vestes sahariennes, bermudas et autres chemisettes couleur sable aux plis impeccablement repassés et aux multiples poches. Poches de tous formats et sous toutes les coutures : à se demander s’ils les remplissaient toutes, une fois là-bas, les acheteurs de “VETEMENTS POUR PAYS CHAUDS”. J”ai rêvé ou les mannequins des deux sexes qui habitaient, étés comme hivers, légèrement vêtus, les vitrines de la boutique étaient coiffés de casques coloniaux ? En tout état de cause, je ne crois pas que dans la ville, à un autre coin de rue, il y ait jamais eu de magasin à l’enseigne “VETEMENTS POUR PAYS FROIDS”, ou alors pas sur le parcours de mes autobus habituels.

PS : le tout petit pan de mur jaune, sur la rue Saint-Dominique, extrême gauche du cadre à hauteur de la voiture grise, c’est le mur d’enceinte de l’hôtel particulier qu’habitait sous le Second Empire Caroline Brame, avec son père. Son journal intime a été publié en 1985, j’en avais rendu compte dans Le mouvement social. Je pense toujours aussi à elle et à son triste destin quand je passe par là.

mai 8, 2017

Rue Flatters, Paris Ve arrondissement

Comments Off

Depuis que j’habite le quartier (quatre ans à la fin de ce mois) je me fais souvent le plaisir, purement gratuit, d’emprunter la rue Flatters. Je l’emprunte à Nathalie Sarraute et je la lui rends, en une sorte d’hommage. Rue d’Enfance, courte et coudée presqu’à angle droit, entre Boulevard de Port-Royal et rue Berthollet ; porteuse de mystère au coin de la rue malgré ses 103 mètres de long (tout compris) et 12 de large.

Une rue parfaite, à la mesure de jambes de toute petite fille. Nathalie a 2 ans quand sa mère Pauline, arrivant de Russie après son divorce s’installe, en 1902, au 3 rue Flatters avec Nicolas Boretzki, qui deviendra son second époux, et la fillette. Les trois passent-là 4 ans – Nathalie fréquente l’école maternelle de la rue des Feuillantines – puis repartent s’installer à Saint-Petersbourg. C’est fini l’enfance rue Flatters, c’est court comme la rue à l’aune de la longue vie de l’écrivain.

“[...] petit appartement de la rue Flatters à peine meublé et assez sombre, mais elle [Pauline] ne semblait pas le remarquer et je n’y faisais guère attention [...]“. On n’en saura pas plus, si ce n’est que la petite aimait, les soirs où des amis rendaient visite à sa mère et à son beau-père, écouter les conversations adultes jusqu’à sombrer dans le sommeil et qu’on l’emporte.

L’appartement de la rue Flatters reste l’appartement heureux de référence, en particulier quand Nathalie revient à 9 ans vivre à Paris, cette fois avec son père, sa nouvelle épouse et la demie-soeur que le couple lui donne (ou plutôt lui impose), rue du Loing puis rue Marguerin dans le XIVe arrondissement. Des petites rues compassées, menant au parc Montsouris – “son seul nom me semblait laid, la tristesse imbibait ses vastes pelouses” – de quoi faire amèrement regretter à l’enfant les rues du Ve. “Il est curieux que ces mêmes maisons, quand j’habitais rue Flatters, m’aient paru vivantes, je me sentais protégée, enveloppée doucement dans leur grisaille jaunâtre… et elles conduisaient aux amusements, à l’insouciance des jardins du Luxembourg où l’air était lumineux, vibrant“.

Et quelques pages d’Enfance plus loin l’auteure oppose encore “cette discrète, presque tendre bienveillance que répandaient sur moi la rue Flatters ou la rue Berthollet” au caractère étriqué, mesquin, sans vie, des rues du Lunain, du Loing et Marguerin. C’est peut-être cela que je vais puiser, quand j’encercle le discret pâté de maisons Port-Royal, Flatters, Berthollet, sa tendre bienveillance porteuse de l’empreinte de Nathalie Sarraute. Le 3 rue Flatters est aujourd’hui un hôtel : aller une nuit y dormir ?

Le collègue qui m’avait offert le folio d’Enfance au printemps 1986 (je date d’après la leçon inaugurale de Maurice Agulhon au Collège de France que nous avions écoutée ensemble, c’était dans ces jours-là) ne se doutait pas comme son petit cadeau me ferait bon et long usage.

Sources biographiques et texte cité : Oeuvres complètes de Nathalie Sarraute dans la Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 1996.

Mesures de la rue : Nomenclature des voies publiques et privées, 8e éd., Paris, Imprimerie nationale – Hôtel de Ville, 1972.

avr 5, 2017

Scène de rue de saison

Comments Off

Cette vieille dame jeune d’esprit qui marche, appuyée sur sa canne, face à moi sur le trottoir de la rue Notre-Dame-des-Champs s’arrête, accote sa canne contre le mur, se baisse précautionneusement, ramasse au sol une samare (arrivée sur ce bitume je me demande bien comment : ni érables ni frênes plantés rue Notre-Dame-des-Champs) et la lance en l’air au dessus de sa tête pour la regarder, tout sourire, tourbillonner en redescendant au sol. Nous échangeons un clin d’oeil et reprenons chacune notre route. Heureux effet printanier. Je me souviens qu’on les appelait hélicoptères dans ma cité d’enfance.

Illustration : Erable sycomore à fruits rouges, par Lefèvre, gravure extraite de la Revue horticole, 1864. Fonds ancien de la Bibliothèque de la Société nationale d’horticulture de France, via Gallica (cette mine).

avr 1, 2017

Scène de rue avec paroles volées

Comments Off

A l’amie silencieuse marchant à son côté, elle disait, celle qui traversait devant moi le boulevard du Montparnasse, que, dorénavant, elle ne lirait plus ses mails qu’une fois par jour – tu vois -, le soir, et éteindrait son téléphone – tu vois -, que cette vie ce n’est plus possible, qu’on ne s’appartient plus. Et je me demandais à qui à quoi elle espérait ainsi échapper, de quelles interactions personnelles ou professionnelles elle voulait se soustraire, et si sa vie s’en trouverait vraiment plus légère. Je n’ai pas souvenir que nos jours étaient plus tranquilles quand nos uniques boîtes à lettres s’ouvraient au moyen d’une clé, non d’un mot de passe, ou quand nos conversations téléphoniques ne s’engageaient qu’un fil à la patte et un toit sur la tête. Je pensais donc que la libération – tu vois – qu’elle escomptait des mesures d’abstraction technologique qu’elle s’apprêtait à mettre en oeuvre était un leurre. A l’écouter, rien que le temps de franchir ensemble ce passage clouté (j’emploie l’expression même si je sais les clous aux belles têtes luisantes chassés par les bandes de peinture thermo-collante que nos piétinements ont vite fait de fatiguer) il y avait tout lieu de penser que seule une auto-déconnection de son ego aurait pu lui procurer, ainsi qu’à son entourage, quelque répit.

PS. Vignette illustrée sans rapport direct, juste pour dire : parfois je ne comprends rien aux périmètres de sécurité sur mon chemin.

mar 29, 2017

Rubriques du blog

Recherche

Archives du blog depuis avril 2008

Sur Twitter

tous textes et photos copyright Martine Sonnet, sauf mention spéciale
var _gaq = _gaq || []; _gaq.push(['_setAccount', 'UA-25117361-1']); _gaq.push(['_trackPageview']); (function() { var ga = document.createElement('script'); ga.type = 'text/javascript'; ga.async = true; ga.src = ('https:' == document.location.protocol ? 'https://ssl' : 'http://www') + '.google-analytics.com/ga.js'; var s = document.getElementsByTagName('script')[0]; s.parentNode.insertBefore(ga, s); })();