L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Montparnasse Monde 32

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Posted by ms on 2 mai 2009 at 11:15

 

Extinction des feux dans la gare. Reste à savoir s’il s’en trouvera un, parmi ceux de la gare, volontaire ou commis d’office à tour de rôle, qui passera éteindre toutes les lumières après le départ du 00h58. Un lointain héritier des moucheurs de chandelles dans les théâtres. Le dernier train, un transilien omnibus (les TGV sont couchés depuis longtemps) qui s’arrêtera partout en essayant de ramener chez eux, ou au moins de les en rapprocher autant que ses rails le lui permettent, tous les banlieusards fatigués résidant entre Paris-Montparnasse et Versailles-Chantiers (et non pas Château). Comme il resterait également à savoir si avant de rallumer pour les travailleurs matinaux et les fêtards sur le retour qui embarqueront dans le 05h13 (encore un transilien : les TGV ne sont pas réveillés), l’éteigneur solitaire aura le temps de faire son tour. Et, en admettant que celui-ci accomplisse sa mission dans les délais qui lui sont impartis, si une fois plongée dans le noir, la gare sera livrée aux chiens et à leur maîtres. Mais ne comptez pas sur moi pour vous proposer de m’y laisser enfermer un soir afin d’éclaircir ces mystères : en dépit des apparences, cela ne me dit strictement rien.

 

 

Souvenir familial de gare : on se demandait si ce jour-là, férié avec pont – que dans les entreprises on récupérerait avant ou après en travaillant un samedi -, ou début des grandes vacances pour juilletistes ou aoûtiens (comme les appelaient les journaux), ils nous mettraient des  ”trains supplémentaires pour Granville”. Des trains que, dans leurs bureaux en étage, ceux de la gare décideraient tardivement de faire circuler. Des trains assemblés comme ils pouvaient, avec des wagons disparates, le plus souvent de générations antérieures à celle en cours et c’était toujours surprenant. On vivait toute la semaine dans l’incertitude et l’espoir du train supplémentaire qui permettrait finalement à tous les candidats au départ si non de s’asseoir au moins de désengorger les couloirs et les plateformes. On essayait de se renseigner comme on pouvait, sans téléphone ; il fallait au moins aller jusqu’à la gare de banlieue la plus proche glaner, en miséreux, les informations. Notre père achetait le nouveau Chaix à chaque parution, l’étalait sur la table et l’épluchait comme si sa vie en dépendait – et de fait elle en dépendait – mais bien sûr les trains supplémentaires n’y étaient pas répertoriés et les horaires des autres, il les connaissait par coeur.

 

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6 Comments

  • On 2 mai 2009 at 12:02 PdB said

    La ligne de partage du Chaix passe juste là : un peu plus à droite (simplement pour vous rendre à Saint-Lô ou à Coutances), vous seriez partis par Saint-Lazare (tout en aurait été chamboulé : mais dans le même temps, c’était justement impossible : sinon, A. et G. se seraient installés qui sait ? à Clichy, Asnières, Bois Colombes ?). Ce territoire-là, cette façon de rester proche des “lignes” est vraiment une unité qui nous marque (je ne sais plus, peut être Philippe de Jonckeere parle de non pas explorer “en ligne” mais “en profondeur” quelque chose – la culture ou l’usage de la hache, je ne sais plus bien) mais cette expression de “en ligne” qui, de nos jours, a tant de ramifications s’adapte parfaitement, aussi, à cette géographie de société nationale (à prendre au pied, comme disait Godard “générale société”, je crois que c’était dans Carmen)

  • On 2 mai 2009 at 12:18 ms said

    PdB : j’aime bien comme vous voyez le partage des lignes et des choses et le partage des choses selon le partage des lignes qui nous tirent…

  • On 2 mai 2009 at 18:42 PhA said

    Montparnasse Monde croise Atelier 62.

  • On 2 mai 2009 at 20:23 ms said

    PhA : forgée d’une seule pièce, alors peut-être

  • On 2 mai 2009 at 20:26 PdB said

    Oui, PhA et c’est justement que ce croisement est comme surdéterminé (et c’est certainement, aussi – parce que notre hôte existe, aussi- , pour cela que ces mots, là, qu’à travers ce clavier, je pose, existent : parce que ces trajectoires, justement sont là – il n’y a rien d’innocent, au fond et ces choses se retrouvent parce que c’était plutôt Granville – la photo d’entrée de site- que Saint-Tropez)

  • On 2 mai 2009 at 23:18 PhA said

    “C’était plutôt Granville…”

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