Usage qu’ils ont des plantes vertes dans la gare. Ici et là mises en terre en pots ronds de différents diamètres, en bacs cubiques ou en jardinières de balcons. La plante unique posée sur un rebord de fenêtre de bureau, hall des départs, au droit du bout de la voie 14, relève manifestement d’une initiative personnelle mal assumée ou mal continuée par un nouvel occupant du bureau qui en aurait hérité contre son gré mais n’aurait pas osé jeté. Scrupule à raison de quoi le végétal dépérit et ses feuilles lancéolées poussiéreuses ploient lamentablement. Les autres plantations procédent d’un plan concerté, escomptant de leur effet sédatif une aide au voyageur à prendre son mal en patience. Autant dire le bercer. Dimension consolante pleinement à l’oeuvre dans la pratique d’enjoliver de verdure les buttoirs. Habillage vert, avant-goût des délices qui attendent celui qui part vers la campagne et amortissement du choc urbain subi par celui qui en arrive. Empruntant un TGV en partance de la gare du Nord ce mercredi, j’y constate le même débordement chlorophyllien des buttoirs ; mais, dans une gare aussi aérienne, la photosynthèse opère sans doute mieux qu’à Montparnasse.
Flore ferroviaire spontanée récurrente mais sensible aux aléas climatiques. Coquelicots déchiffonés courrant mai – après l’hiver doux 2006/2007, c’était même chose faite dès le 25 avril, je l’avais noté sur mon carnet – pour accompagner jusqu’en juillet, sur le bas côté des voies, le trajet Clamart-Paris Montparnasse. Escorte impressionniste arrêtée net par le pont enjambant la rue de la Procession, XVe arrondissement, qui coupe radicalement la route à l’espèce. Plus un seul coquelicot une fois franchi et quel que soit l’éventuel écart des températures aux moyennes saisonnières. Prennent le relai d’insignifiantes mais vivaces petites fleurs jaunes que j’aime à penser douées de vertus médicinales : utile chélidoine qui soigne les verrues ou millepertuis le vague à l’âme, pour s’en tenir au jaune, mais je ne suis pas botaniste. Et de grandes et fières fleurs mauves, originaires de Chine, toxiques et invasives, Buddleia de David (ou plus simplement “lilas d’été” ou encore “arbres aux papillons”), connues pour leur addiction aux rails, enseignent les encyclopédies illustrées dans lesquelles je crois les reconnaître.