L'employée aux écritures

le blog de Martine Sonnet – ISSN : 2267-8735

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"Le problème de la nuit reste entier. Comment la traverser, chaque fois la traverser tout entière ?" Henri Michaux

Montparnasse Monde 14

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Posted by ms on 20 décembre 2008 at 10:27

 

Depuis qu’en gare de Paris-Montparnasse il m’arrive parfois d’embarquer pour des destinations plus ambitieuses que Sèvres Rive Gauche ou Granville, je comprends mieux un certain nombre de choses. Y compris sur un plan assez personnel. Comme l’origine de ma maladresse de voyageuse qui pourrait s’enraciner dans une enfance qui n’apprend à partir que de cette seule et unique gare, à une époque où celle-ci ne desservait encore que des terres finies, et si lentement qu’il fallait même des trains de nuit pour atteindre les plus lointaines. L’entrave restée de son horizon indépassable. Et l’angoisse qui rôde autour des guichets « départs dans l’heure », comme si une décision aussi  grave se prenait dans un délai aussi court ; je ne risque pas d’avoir à faire à ceux-là. D’ailleurs, aux « départs dans l’heure », jamais la queue. Pas comme aux guichets moins regardants sur le temps que vous mettrez à vous décider. (Ce qui prouve que je ne suis pas la seule à me garder de ces départs sur le champ).

 

 

Les trains pour Granville, relégués à la dernière extrémité de la gare, sont les plus sujets à la résurgence, chez leurs passagers, de ce vieux manque de savoir voyager qui m’affecte comme d’autres natifs de la région. D’où la conjuration de ce mauvais sort par des usages ferroviaires qui nous sont propres. Battre les records d’arrivée en avance et s’installer dans le train pas encore affiché. Venir en grappe solidaire accompagner celui qui part, et l’assommer de recommandations, ou attendre celui qui arrive, et le presser de questions. A peine assis à bord, déballer ses provisions et manger bruyamment dans une totale indifférence à l’heure qu’il est comme au monde autour. Les esquilles de coquilles d’oeufs discrètement chassées de la main vers le creux entre les sièges. Se refuser à perdre de vue ses bagages, quitte à obstruer l’unique passage – et une fois même, c’était une chèvre couchée sur la plate-forme qui obstruait l’accès aux toilettes : j’ai vu cela, de mes yeux vu. Alors je souris en mon for intérieur quand la voix coupée/collée, si mal raccordée, voudrait que ce train à bord duquel j’ai pris place, et qui desservira notamment Villedieu-les-Poêles, s’appelle Intercités.

Filed under Montparnasse monde
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14 Comments

  • On 20 décembre 2008 at 11:38 PdB said

    Une autre histoire : on prenait le train à Dijon, vers 5 heures du matin, pour aller vers Paris où on devait pointer vers 9, le train venait de chez Tito, Simplon Express ou quelque chose, on distribuait des questionnaires aux nouveaux réveillés, les yeux embués d’un nouveau pays, parcours, air, chemin, paysage, rêve, enfin on les prenait en traître. Il y en avait huit (que des hommes) dans ce compartiment et j’ai fait mon travail, j’ai distribué huit questionnaires à ces huit serbes croates herzégoviniens de Macédoine, ou quoi d’autre, mais pas dans le dialecte, il va sans dire (la société nationale ne reconnaît que 4 langues forces en l’Europe); quand je suis revenu pour ramasser, ils s’en étaient servi comme de plateau, y mangeaient du poulet et des oeufs (l’odeur est encore là), ils avaient ouvert une de ces bouteilles de vin qu’on recouvre d’une tresse jusqu’à mi-ventre. J’ai ri, on a parlé un vague sabir italo-franco-anglais, ils m’ont offert du vin (sept heures du, pas facile), j’ai trinqué à la France, et j’ai continué mon ouvrage.

  • On 20 décembre 2008 at 12:51 PhA said

    Une chèvre sur la plateforme ? Je ne suis donc pas seul à en voir. (Et ce n’était pas dans ce train, dont je connais surtout l’arrivée – “attendre celui qui arrive” -, lui ayant le plus souvent préféré la voiture.)

  • On 20 décembre 2008 at 13:21 ms said

    PdB, votre histoire est chouette et PhA, une chèvre sur la plateforme, oui vous avez bien lu, mais en allant vers l’Ouest tout est possible

  • On 20 décembre 2008 at 14:41 PhA said

    J’ai un ami, originaire justement de Villedieu-les-Poêles, qui dirait sûrement comme vous.

  • On 20 décembre 2008 at 14:48 PdB said

    Je vois que vous repassez par “vies du jour” à présent, tant mieux, mais pour ce qui est des anniversaires, c’est sûr qu’on ne peut s’empêcher d’y penser, ça ne fait pas de doute, mais il y aussi tout le reste : par exemple, la cousine de ma mère (génération 1) est née un 20 12, mes soeurs (vous savez elles sont jumelles : G2) de même, la fille de mon frère (ma nièce yes! : G3 ) aussi, on attend de voir comment vous se débrouiller nos enfants pour faire en sorte de : donc tous les 20 mars avec mon frère, on se réunit et on boit aux suivants (même si, vous remarquerez, que ce ne sont que des filles qui naissent à cette date dans ma famille : on n’est pas chien (ni chienne) on assume… : G4)
    Juste pour tenter d’en sortir, disons…

  • On 20 décembre 2008 at 15:53 Anne savelli said

    Juste avant de prendre le train (gare du Nord of course), salutations de qui n’a jamais vu de chèvre sur une plateforme quelle que soit la destination !

  • On 20 décembre 2008 at 16:28 ms said

    PhA : avoir un ami originaire de Villedieu-les-Poêles n’est pas donné à tout le monde, ne vous brouillez pas avec lui, je ne suis pas sûre qu’on en retrouve facilement, même sur facebook (où je ne suis toujours pas, contrairement aux apparences onomastiques)

    PdB : votre famille est pleine de ressources, n’en changez pas

    Anne : très bon voyage vers le Nord

  • On 20 décembre 2008 at 23:46 PdB said

    Même si je voulais, je ne pourrais en changer, voyez… A présent, ma tante et son bras cassé se révoltent … Pfff… On affronte, mais avec toutes ces affaires, vous savez, comme les vôtres, en fait (je suis le dernier, mais moins loin : je peux parler à l’aîné en lui disant : fais le, quoi, merde, c’est toi l’aîné ” et il peut me répondre “je t’emmerde” c’était le dialogue ce midi place Clichy) : je me suis trompé d’adresse, là, ou quoi ? Oui.
    Et qui a pris la photo (je me demandais) au tableau noir “lecture” ? Une des soeurs ou une des bibliothécaires ?
    @ Anne : bon voyage, n’oublie pas les photos…
    @ PhA : (paraphrase) vos amis sont plein de ressources, n’en changez pas… :-) ))

  • On 21 décembre 2008 at 2:01 PhA said

    @ms Le croirez-vous ? je ne l’ai pas connu sur Facebook (ou malgré les mêmes apparences, je ne suis toujours pas, moi non plus) – ni à Villedieu-les-Poêles, d’ailleurs (joli bourg, en passant).
    @PdB Que serions-nous sans nos amis et nos familles…

  • On 21 décembre 2008 at 14:30 ms said

    PhA, si un jour je vais en train jusqu’à Granville, ce qui ne m’est jamais arrivé comme je vous le disais à la fête de l’Huma, je ferai une interruption de parcours pour visiter Villedieu-les-Poêles

    PbB, la photo de Noël 1961 pourrait avoir été prise par l’époux de ma soeur qui s’est mariée en décembre cette année-là, mais je ne m’en souviens pas plus que ça

  • On 21 décembre 2008 at 20:10 Dominique Hasselmann said

    Le mot “escarbilles” s’est comme envolé définitivement : on pouvait en recevoir dans l’oeil, quand on était tout petit, par la fenêtre baissée (quelle inconscience !).

    L’amusant, c’était d’apercevoir la loco dans les courbes, avec son panache de fumée noire : oui, il y avait bien quelqu’un qui nous conduisait quelque part, on était attachés à lui.

    Dans les compartiments, petits appartements du voyage, il y avait des “filets à bagages”, un peu comme des hamacs en réduction. Et les cendriers SNCF à couvercle signifiaient qu’il était autorisé de fumer (pour nous, c’étaient des cigarettes en chocolat).

    Le hululement du train à vapeur et son rythme à la Ravel berçaient les enfants : les adultes lisaient des journaux de grand format qui laissaient des traces noires sur les doigts : un monde de suie, finalement.

  • On 21 décembre 2008 at 20:32 ms said

    Dominique, aussi dans les compartiments, entre le haut des banquettes et les filets à bagages, des paysages avec des ponts, des viaducs ou des châteaux en hauteur encadrés sous verre (je dirais 4 par compartiments)

  • On 22 décembre 2008 at 21:36 PhA said

    Un livre où les trains étaient en question : Le désordre des tranquilles, de Jean-Paul Curnier. C’était chez Farrago, je crois. (Ce sont les paysages au-dessus des banquettes dans les compartiments, qui le rappelle à ma mémoire.)

  • On 22 décembre 2008 at 23:10 PdB said

    Dans les trains de nuit (ceux qui nous emmenaient tous les six vers la Croix Valmer, 62), ces photographies étaient à l’aplomb des couchettes du milieu, j’en occupai une et regardai les lumières de la gare d’Orange, je m’en souviens comme d’hier, quatre heures du matin à la montre carrée offerte par mon grand-père, tout le monde dort et je bouge le rideau, vacances en juillet, arrivée à Toulon, puis autobus jusque l’arrivée vers midi

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